L'avocat Barère,
membre du Comité de salut public, souligne dans cettte
déclaration les difficultés du régime révolutionnaire
à s'imposer dans quatre régions : la Bretagne et
la Vendée, soumises selon lui à l'autorité
du clergé ; l'Alsace où l'on parle la langue des
Prussiens et des Autrichien ; le Pays basque, hermétique
au français ; et la Corse où l'usage de l'italien
favorise l'influence du pape. Plus généralement,
ce texte montre la volonté des révolutionnaires
de transformer profondément le pays et de créer
"des hommes nouveaux", unis par la langue de la raison
et du progrès : le français.
« Le législateur parle une langue que
ceux qui doivent exécuter et obéir n'entendent
pas.
« Il faut populariser la langue, il faut détruire
cette aristocratie de langage qui semble établir une nation
polie au milieu d'une nation barbare.
« Nous avons révolutionné le gouvernement,
les lois, les usages, les moeurs, les costumes, le commerce et
la pensée même ; révolutionnons donc aussi
la langue, qui est leur instrument journalier.
« Vous avez décrété l'envoi des lois
à toutes les communes de la République ; mais ce
bienfait est perdu pour celles des départements que j'ai
déjà indiqués. Les lumières portées
à grands frais aux extrémités de la France
s'éteignent en y arrivant, puisque les lois n'y sont pas
entendues.
« Le fédéralisme et la superstition parlent
bas-breton ; l'émigration et la haine de la République
parlent allemand ; la contre-révolution parle l'italien,
et le fanatisme parle le basque. Cassons ces instruments de dommage
et d'erreur.
« Le Comité a pensé qu'il devait vous proposer,
comme mesure urgente et révolutionnaire, de donner à
chaque commune de campagne des départements désignés
un instituteur de langue française, chargé d'enseigner
aux jeunes personnes des deux sexes, et de lire, chaque décadi,
à tous les autres citoyens de la commune, les lois, les
décrets et les instructions envoyés de la Convention.
« La France apprendra à une partie des citoyens
la langue française dans le livre de la Déclaration
des droits.»
Rapport du
Comité de salut public sur les idiomes, présenté par Barère
à la Convention le 8 pluviôse an II.
|