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L'inégalité entre l'homme et la femme exclue du vote et inférieure juridiquement

Une brève histoire des femmes
Les grandes dates (document Insee)
Chronologie des luttes des femmes du XIX° à nos jours
Les grandes dates dans l'éducation, le travail, les droits
Des textes et des documents pour plonger dans l'ambiance du XIX° siècle
Un parcours d'enquête sur le Web
L'évolution du Code civil, sur les rapports entre hommes et femmes, sur le divorce, de Napoléon à nos jours
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(Doc. Jean Capillon)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 C)  Les femmes : des activités variées, un même statut inférieur

La Révolution

Un quotidien très

Des conditions variées

Au temps des Révolutions

Du féminisme au suffragisme

1) La voix des femmes, pour la première fois distinctement, pendant la Révolution
Dès les premiers jours de la Révolution, la question des femmes est soulevée.  Par des hommes comme Condorcet (Essai sur l'admission des femmes aux droits de cité) ou des femmes comme Olympe de Gouges, qui proclame en 1791 une Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne. Elle demeure très isolée. Très actives lors des journées révolutionnaires (5-6 octobre 1789, 10 août 1792), revendiquant avec  Théroigne de Méricourt de porter les armes, dynamiques dans les Clubs féminins, les femmes restent exclues de la citoyenneté. Olympe de Gouges est même guillotinée pour avoir voulu « être homme d’État ». Après la Terreur, les rassemblements de plus de 5 femmes deviennent illégaux.  

Olympe de Gouges menée à la guillotine

Deux figures du féminisme

Portrait de Maria Deraismes

Olympe de Gouges conduite à l'échafaud. Fuyant le domicile conjugal à 20 ans, elle je jette à corps perdu dans la Révolution, tout en restant proche des monarques. Sentant le danger, elle envisage l'exil à Londres pour y faire représenter l'une de ses pièces contre l'esclavage. Elle est arrêtée pendant la Terreur, pour girondisme, et exécuté le 6 novembre 1793.

Journaliste, Maria Deraismes se fait connaître par ses talents d'oratrice dans les nombreuses réunions où elle revendique des droits pour les femmes, en insistant sur le droit à l'éducation. Elle est la première femme à devenir franc-maçonne et mène aussi un combat anti-clérical. En 1866, elle fonde l'Association pour le Droit des Femmes, avec Paule Mink et Louise Michel.


Elles obtiennent toutefois un statut civil : le contrat de mariage, le divorce (septembre 1792), le droit égal à l'héritage (qui se faisait souvent au détriment des filles), l'abrogation de la puissance paternelle sur les majeures…

2) Un quotidien très dur pour les femmes
Qu'ils soient hommes politiques, philosophes ou médecins, les hommes  réaffirment l’infériorité naturelle de la femme, mineure à vie, dont la place est naturellement au sein de la famille dominée par le mari. C'est la philosophie du Code napoléonien, aggravé par l'alliance entre l'Église et la Restauration (1815-1830). Le divorce est ainsi supprimé en 1816... « La femme est une propriété que l'on acquiert par contrat ; elle est mobilière car la possession vaut titre; enfin la femme n'est à proprement parler qu'une annexe de l'homme... » écrit Balzac dans la Physiologie du Mariage.
Juridiquement, la femme est incapable (c'est seulement en 1907 que l'épouse pourra disposer de son salaire - tout en étant souvent le « ministre des finances » dans les milieux populaires ; sa correspondance sera contrôlée jusqu’en 1938).

Des conditions variées
La paysanne : au milieu du siècle, dans une France encore aux ¾ rurale, les femmes représentent presque la moitié de la population active agricole. Encore en 1866, 40% des femmes sont dans les campagnes, contre 27% à l’industrie et 22,5% au service domestique. Au travail des champs s'ajoutent le travail domestique, mais aussi souvent des activités de lingère, repasseuse, couturière, ou l’animation de petits commerces. Victimes des préjugés, les femmes suscitent la défiance des hommes : elles se tiennent à l’écart des aliments du saloir le jour de leurs règles. Fontaine, lavoir, marché constituent autant de lieux de sociabilité pour les femmes, qui n'ont pas accès aux cafés masculins. 

Paysannes dans les champs

Paysannes dans les champs de Contescourt (Aisne) 
(Carte postale, avant 1914)

La bourgeoise : elle impose de plus en plus les normes de la famille normale. La morale bourgeoise condamne le couple illégitime - souvent ouvrier -, le célibat, l’homosexualité. Les familles cherchent à nouer des alliances par des mariages de raison. A la maison, l'épouse supervise le travail des domestiques et s’occupe de l’éducation morale et religieuse des enfants.  Les oeuvres de charité, les réceptions chez les unes et les autres permettent aux femmes de se retrouver à l'extérieur de la maison. Le monde ouvrier n'est pas insensible à ce modèle bourgeois, dans la seconde moitié du siècle : l’ouvrier appelle son épouse « ma bourgeoise ». Il la souhaite  au foyer : le travail des femmes après tout est anormal,  et il  concurrence celui des camarades. La place des femmes est à la maison... La ménagère représente un idéal de respectabilité. En 1898, la CGT, tout en souhaitant l'égalité des salaires, précise résolument que seules sont "autorisées" à travailler les célibataires et les veuves.

Entre paysanne et ouvrière : il y a d’abord les domestiques (33% des femmes actives en 1896), souvent menacées de devenir « fille-mères », les nourrices. L’urbanisation et le mode de vie bourgeois offrent de nouveaux métiers dans la couture (passementières, chapelières), la blanchisserie, le commerce. La révolution industrielle utilise la main d’œuvre féminine et enfantine, surtout dans le textile, où se trouvent les ¾ des femmes travaillant dans l’industrie vers 1900. Après les lois limitant le travail des enfants (1841, 1874), les femmes sont encore plus recherchées dans les usines, dans des travaux répétitifs, longs, épuisants, très mal payés (les salaires féminins resteront légalement inférieurs jusqu'en 1946), sous-qualifiés, conduits par des contremaîtres parfois abusifs. L’enseignement technique s’adresse uniquement aux garçons, surtout après 1880, tandis que dans les programmes des écoles primaires et des écoles normales de filles, l’État encourage les travaux de coupe (1880), d’aiguille et l’apprentissage de la dentelle à la main (1903).
Les emplois de service, en "col blanc", se multiplient. Ces vendeuses, dactylos, demoiselles des postes, sage-femmes, institutrices contribuent à légitimer le travail féminin. 


3) Les femmes au temps des Révolutions
Montées sur les barricades en 1830 pour renverser Charles X, les femmes n’acquièrent aucun nouveau droit. Seuls les utopistes (fouriéristes, saint-simoniens), et les tous premiers journaux féministes envisagent l’égalité entre sexes. Les femmes doivent se contenter d'être les modèles d’allégories symbolisant sur les peintures, les fontaines, les fresques vertus et muses inspiratrices, de la Liberté notamment. En 1848, les femmes sont écartées du rétablissement du suffrage universel, malgré les efforts (journaux, pétitions, Clubs féminins) des « Femmes de 1848 ». Même un socialiste comme Proudhon affirme qu’entre « ménagère ou courtisane, il n’y a point pour la femme de milieu » (décembre 1848). A quoi Flora Tristan répond : « L'homme le plus opprimé peut opprimer un être, qui est sa femme. Elle est la prolétaire du prolétaire ».
Église, monarchistes et républicains refusent aux femmes l'accès à l'instruction, tant la nature les voue à leurs tâches domestiques et à la maternité. Il faut attendre la loi Duruy de 1867 pour que l'État consente un effort éducatif (chaque commune de plus de 500 habitants doit avoir une école de filles). A la veille des lois Ferry, le journal Le Gaulois se désole : 


"La jeune fille française, élevée dans la protection vigilante de la famille, avait été avec soin préservée de l’éducation garçonnière et des brutalités de la science. Elle grandissait parmi les sourires et les joies, comme une fleur dans le soleil ; elle grandissait dans une poétique ignorance des mystères des choses […]. Et cette paix candide de jeune fille, cette délicieuse floraisons de pudiques désirs, ces élans d’idéale bonté qui plus tard font l’amour de l’épouse, le dévouement de la femme et le sacrifice de la mère, tout ce charme exquis, toute cette poésie […], tout cela va disparaître ! On va supprimer la jeune fille […]. On leur apprendra tout, même la rébellion contre la famille, même l’impureté. Elles n’auront même pas été vierges avant de devenir femmes."

25 novembre 1880
 


4) Du féminisme au "suffragisme"
Terme d’origine médicale, le féminisme désigne tout d'abord un homme manquant de virilité (Alexandre Dumas l'évoque dans cette acception). Les dernières années du Second Empire permettent une résurgence du féminisme, dans son sens moderne. En 1870, la journaliste Maria Deraismes fonde l’Association pour le droit des femmes, pour l’obtention des droits civils et de réformes en faveur de l’éducation des filles. 
Dans les années 1880, le féminisme réunit des groupes aux revendications plus ou moins radicales. Conférences, journaux,  manifestations, autodafés du Code Civil, les premières féministes revendiquent d'abord droits sociaux et droits civils :  
- l’accès des femmes à l’éducation (ouverture des lycées aux filles en 1880, mais sans les matières nobles comme le latin ou la philosophie, et sans préparation du baccalauréat, donc sans accès à l’université),  
- réforme du Code civil (le divorce est rétabli en 1884),
-  conquête de nouveaux métiers (les infirmières remplacent peu à peu les religieuses, les institutrices - cantonnées aux classes de filles -, vendeuses de magasin et employées de bureau, « demoiselles des postes et du téléphone »). 
Au travail, les ouvrières, très peu syndiquées, n’entendent guère parler du droit des femmes. 
La III° République, issue de la chute de Napoléon III en septembre 1870, rétablit le suffrage « universel », mais sans y inclure les femmes. Victor Hugo, qui est un temps président d'honneur de la Ligue française pour le droit des femmes, le déplore : « Il y a des citoyens, il n’y a pas
de citoyennes. C’est là un état violent, il faut qu’il cesse ». Un mouvement suffragiste fait alors son apparition. Des militantes radicales, comme la socialiste Hubertine Auclert, multiplient les épreuves de force : refus de payer l’impôt (« Je ne vote pas, je ne paie pas »), manifestation contre le 14 juillet, attaques d'urnes, candidature électorale. La presse parle alors de « suffragette », comme en Angleterre. Peu à peu, les mouvements féministes issus des classes moyennes se rallient à une forme modérée du suffragisme : seul le suffrage municipal est réclamé.

Sarah Bernhardt

Sarah Bernhardt (1844-1923) : elle est l'héroïne dans "La Tosca", drame de Victorien Sardou. Une photographie stéréoscopique des ateliers Nadar, extraite des expositions en ligne du Ministère de la Culture. 

En 1906, le travail des femmes est une réalité massive : elles forment 38% de la population active. Plus de la moitié sont encore dans des secteurs traditionnels (domesticité, travail à domicile). Mais les premières avocates, médecins (87 femmes en 1900 !), professeurs agrégées (Marie Curie est la première femme professeur à la Sorbonne en 1906) apparaissent. Sur le plan des mœurs, les mentalités évoluent. Le modèle bourgeois de la femme au foyer s'effrite, sous les coups de la nécessité du travail féminin ou d'une revendication assumée de liberté. Un cinquième des femmes mariées travaillent. Vers 1880, la « garçonne » à la nuque rasée, indépendante, n'hésitant pas à conduire les premières automobiles renverse complètement le modèle de la soumission.  En réaction, l’identité masculine est bousculée, et se réfugie dans le sport, la littérature policière, l’amitié virile…