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C)
Une France bouleversée, une France modernisée (1789-1815)
1) Une société profondément
transformée
Après un quart de siècle de Révolution et
d'Empire, les structures du pays ont été complètement
transformées. Certes, en 1815, avec la Restauration des
Bourbons (Louis XVIII, puis Charles X), la France est redevenue
une monarchie. Mais le pays a osé la République,
guillotiné Louis XVI, expérimenté le suffrage
universel, inventé la nation souveraine et le régime
d'assemblée, la démocratie représentative.
La monarchie de 1815 n'a rien à voir avec celle de l'Ancien
Régime jeté à bas : la société
d'ordres a disparu, les privilèges ont été
abolis (les droits féodaux ont été totalement
abolis en 1793) et le clergé réfractaire, les nobles,
les émigrés rentrés avec Louis XVIII ne
peuvent récupérer leurs terres confisquées
et vendues.
La bourgeoisie gagnante
Un immense transfert de propriété a
eu lieu au bénéfice de la bourgeoisie et des plus
aisés des paysans. Cette bourgeoisie a renforcé
ses positions au cur de l'État en décrochant
postes militaires et administratifs. Au niveau économique,
la loi Le Chapelier, dès 1791, a brisé toute possibilité
de compagnonnage et de grève pour les ouvriers, soumis
au livret ouvrier par Bonaparte.
Entrés massivement en politique, les Français se
sont reconnus acteurs de l'histoire, à Paris, dans les
campagnes, mais aussi en parcourant les routes d'Europe dans
les campagnes militaires du Directoire (qui impose la conscription
en 1798) et au sein de la Grande Armée.
Un sentiment national
s'est forgé dans la revendication d'une société
meilleure, plus égalitaire, mais aussi dans la guerre
et dans la progression du français, langue de la Nation
que les révolutionnaires tentent d'imposer contre les
dialectes et les patois (lire le texte d'un
législateur de l'époque).
2) Un cadre territorial et administratif
unifié
Une langue unique pour une Nation unifiée : la Révolution
déclenche, surtout avec les Jacobins et les Montagnards,
une volonté de centralisation politique et administrative
que Bonaparte porte à son comble.
Tout le territoire est
découpé, en 1790, en départements, subdivisés
à leur tour en arrondissements, cantons et communes, circonscriptions
de base de toute la vie politique, fiscale, religieuse du pays.
Trois impôts nouveaux voient le jour : foncier, mobilier,
et pour les commerçants, la patente.
En 1791, le système
métrique unifie les unités de mesure et de poids,
tandis que l'état-civil est confié aux autorités
municipales laïques. Bonaparte contrôle d'une main
lourde ces nouveaux instruments de pouvoir, par le biais d'une
administration étoffée et des préfets (lire deux
textes sur les préfets d'Empire).
Pour la première
fois, le territoire français est véritablement
unifié, avec la disparition de tous les péages
et douanes intérieurs.
3) Des symboles pour une histoire
nouvelle
Ce quart de siècle d'histoire lègue un héritage
symbolique extrêmement riche, capable de nourrir les combats
politiques tout au long du XIX° siècle. Ainsi de la
cocarde et du drapeau tricolores, symboles par excellence de
la Révolution, armes décisives pour les républicains
affrontés aux monarchistes, ou pour les orléanistes
affrontés aux légitimistes.
De la même façon,
la Marseillaise, de chant guerrier pour l'armée du Rhin,
est devenue un hymne révolutionnaire et patriotique.
Influencés
par les philosophes, les révolutionnaires rêvent
d'une éducation pour tous destinée à enraciner
en l'homme nouveau l'amour de la patrie et la haine du tyran. Toutefois,
une génération entière a découvert une violence politique inédite,
massive, culminant dans la Terreur et la guerre civile contre les
Vendéens.
Symbolique aussi de cette conscience partagée par tous
qu'une ère nouvelle a succédé à l'Ancien
Régime, l'adoption d'un calendrier révolutionnaire
(lire les arguments
de Fabre d'Églantine) et l'accélération d'une
déchristianisation entamée dès la fin du
XVIII° siècle.
Enfin, la période lègue le thème, vigoureux
jusque dans le cur du XX° siècle (Pétain,
De Gaulle...), du sauveur plébiscité par le peuple
démuni. Dès lors, deux pôles de la vie politique
française à l'époque contemporaine sont
fixés : d'un côté, la quête d'un régime
démocratique ; de l'autre, l'abandon aux mains de
l'homme providentiel.
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